Le compte-rendu de la réunion du 11 avril 1871 des citoyennes et une adresse à la Commission exécutive
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Le 13 avril parait au Journal Officiel (tenu par la Commune) le compte-rendu de la réunion des citoyennes du 11 avril, ainsi qu’une adresse envoyée à la commission exécutive de la Commune (donc que des hommes). Adresse qu’on retrouve dans les journaux, notamment dans La Sociale, le dimanche 16 avril.
Le compte-rendu de la réunion donne à voir l’organisation des femmes – celles qui sont en train de créer l’Union des femmes pour la défense de paris et les soins aux blessés – dans la Commune en train de se faire : elles choisissent de s’organiser par arrondissement et d’élire leurs représentantes. Elles se mettent en contact avec l’Assemblée principale et s’appuie sur elle pour diffuser leurs propositions.
On observe aussi par l’adresse qu’elles envoient à la Commission exécutive – l’organe central qui chapeaute les commissions de l’Assemblée de la Commune – qu’elles cherchent à imposer un mode de fonctionnement qu’elles se sont choisies. Leur proposition seront d’ailleurs mise en œuvre. L’union des femmes possédait une sorte de bureau central dans la mairie du Xe arrondissement au 72 rue du Faubourg Saint Martin, et des bureaux dans les mairies de tous les arrondissements où les comités d”arrondissement tenaient des permanences.
Rappelons que l’organisation de la Commune a varié entre le 28 mars et le 21 mai. Si le choix de transférer le pouvoir aux arrondissements reste le cœur du projet, l’assemblée communale va modifier plusieurs fois son fonctionnement. Le 11 avril, elle est composée de commissions chapeautées par une commission exécutive. A partir du 21 avril, les référents de commissions seront l’exécutif. Début mai, un comité de salut public aura la charge des décisions urgentes et secrètes. Ces évolutions sont à la fois le fait de réflexions politiques sur l’organisation du pouvoir, mais aussi les réponses aux besoins d’organisation liés à la guerre. La pression militaire mise par Versailles forçait la Commune à être efficace.
Dans Il faut Venger Gervaise, le petit Victor, encore mioche pendant la Commune, se demande s’ils pourront être un jour heureux. Plus les jours passaient, et plus il devenait éclatant que Thiers et les Versaillais ne laisseraient pas les insurgés être tout simplement libres et égaux.
Extrait du JO, 13 avril.
“Mardi 11 avril, eut lieu la réunion des citoyennes, convoquées dans le but d’organiser dans chaque arrondissement des comités destinés à servir de bureaux d’enregistrement, de renseignements et de direction pour les citoyennes patriotes résolues à soutenir et à défendre la cause de la Révolution, soit en constituant des corps réguliers pour le service de l’ambulance, soit en formant des compagnies prêtes, au moment du danger suprême, — si Paris était envahi, à construire des barricades et à s’y battre d’ensemble avec ceux d’entre nos frères pour qui la lutte engagée est une question de vie et de mort, e tant qu’il y va du triomphe ou de la défaite, — momentanée naturellement, — des principes vitaux de l’humanité, la liberté luttant contre le despotisme, le travail contre le capital, l’avenir enfin contre le passé !…
Après des délibérations successives, des comités se sont organisés pour la plupart des arrondissements.
Le comité central provisoire se réformera prochainement et sera constitué des délégués des comités d’arrondissements.
La liste des membres des comités, ainsi que les statuts et les règlements et l’indication des sièges des comités, sera insérée sous peu dans tous les journaux démocratiques.
Une adresse des citoyennes, signée des membres du comité central provisoire, a été envoyée à la commission exécutive de la Commune, lui demandant de fixer des locaux pour les comités, afin qu’ils puissent y siéger en permanence, et d’assigner des salles de réunion à la disposition du comité central.
La commission exécutive de la Commune a adhéré à la demande, et l’installation des comités va s’effectuer.
Le comité central des citoyennes tâchera de se mettre en rapports avec les commissions d’ambulances et de barricades du Gouvernement, afin d’aider de toutes ses forces au travail de la Commune, en tant que lesdites commissions du Gouvernement n’auront qu’à s’adresser au comité central des citoyennes, pour avoir le nombre voulu de femmes prêtes à servir aux ambulances, ou en cas de besoin aux barricades.
Une seconde réunion, convoquée par le comité a eu lieu aujourd’hui 13 avril.
La somme a été versée à la caisse du comité central des citoyennes.”
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Adresse des citoyennes à la Commission exécutive de la Commune de Paris
J.O. du 13 avril 1871
“Considérant
Qu’il est du devoir et du droit de tous de combattre pour la grande cause du peuple, pour la Révolution ;
Que le péril est immédiat et l’ennemi aux portes de Paris ;
Que l’union faisant la force, à l’heure du danger suprême, tous les efforts individuels doivent se fusionner pour former une résistance collective de la population entière, à laquelle rien ne saurait résister ;
Que la Commune, représentante du grand principe proclamant l’anéantissement de tout privilège, de toute inégalité, par la même est engagée à tenir compte des justes réclamations de la population entière, sans distinction de sexe – distinction créée et maintenue par le besoin de l’antagonisme sur lequel repose les privilèges des classes dominantes ;
Que le triomphe de la lutte actuelle – ayant pour but la suppression des abus, et, dans un avenir prochain, la rénovation sociale tout entière, assurant le règne du travail et de la justice – a, par conséquent, le même intérêt pour les citoyennes que pour les citoyens ;
Que le massacre des défenseurs de Paris par les assassins de Versailles, exaspère à l’extrême la masse des citoyennes et les pousse à la vengeance ;
Qu’un grand nombre d’elles sont résolues, au cas où l’ennemi viendrait à franchir les portes de Paris, à combattre et vaincre ou mourir pour la défense de nos droits communs ;
Qu’une organisation sérieuse de cet élément révolutionnaire est une force capable de donner un soutien effectif et vigoureux à la Commune de Paris, ne peut réussir qu’avec l’aide et le concours du gouvernement de la Commune ;
Les déléguées des citoyennes de Paris demandent à la commission exécutive de la Commune :
1° de donner l’ordre aux maires de tenir à la disposition des comités d’arrondissement et du Comité central, institué par les citoyennes pour l’organisation de la défense de Paris, une salle dans les mairies des divers arrondissements, ou bien, en cas ;
2° de fixer dans le même but un grand local où les citoyennes pourraient faire des réunions publiques ;
3° de faire imprimer aux frais de la Commune les circulaires, affiches et avis que les dits comités jugeraient nécessaire de propager.
Pour les citoyennes déléguées, membre du Comité central des citoyennes : Adélaïde Valentin, ouvrière, Noëmie Colleville, ouvrière, Marcand, ouvrière, Sophie Graix, ouvrière, Joséphine Pratt, ouvrière, Céline Delvainquier, ouvrière, Aimée Delvainquier, ouvrière,Elisabeth Dmitrieff.”
L’illustration est toujours d’Hélène Maurel.